dimanche, juillet 26, 2009

Far more

Aujourd'hui, en faisant la vaisselle, je me suis rappelée de quelque chose dont je me rappelle parfois mais que je n'ai jamais cherché à attribuer à quoi que ce soit.

Peut-être que c'est un peu audacieux, un peu stupide, un peu lié à l'overdose de séries teenago-romantiques à laquelle je me livre ces jours-ci mais c'est venu, j'aimerais essayer.

L'été de la 6ème à la 5ème je suis allée pour la première fois de ma vie en Angleterre, j'ai pris l'avion pour deux semaine de cours et d'activités, comme tous les enfants ou presque l'ont expérimenté, dans un collège en briques rouges, dans une famille, dans une maison qui ressemble tellement à toutes ces autres maisons.

Et dans cette avion, j'étais toute petite, j'avais 11 ans, je ne peux pas parler de peur, pas vraiment, j'étais assise du côté du hublot et la British Airways avait servi des sandwiches et des gros KitKat. C'était la première fois que je prenais l'avion, comme tous les enfants, là aussi, j'étais abasourdie. C'était le début d'une longue série de vols toute seule mais je m'en fichais, ma maman m'avait dit que l'Angleterre était belle et que j'en tomberais amoureuse.



Du côté de ce hublot, j'étais petite et je mangeais seulement des sandwiches préparés avec du pain de mie, celui là était au pain frais, avec de la salade et des tomates, impossible à concilier avec mon absorption totale des nuages et de la ville qui s'envole en dessous de mes pieds. A côté de moi, un garçon qui devait être beau, un homme pour moi, un grand garçon de 14 ans. Mais là aussi je m'en fichais. Je n'avais définitivement pas faim, alors je lui ai demandé s'il voulait ma part, il a dit oui. Il m'a demandé combien de temps je restais, et je lui ai répondu. Quelques minutes plus tard, je lui ai demandé s'il pouvait me rendre le KitKat, parce que finalement, ça, je voudrais bien le manger. Le moment de grâce aéronautique avait cessé. J'avais faim.

C'était sans importance, n'importe qui l'aurait fait. Rien de fantastique là dedans mais quand j'y repense j'ai peur, parce que je sais que jamais plus je ne ferais ça à nouveau, jamais je n'adresserais la parole à un inconnu, pas aussi spontanément, pas pour lui offrir quelque chose, et je sais qu'on me dirait non. A 11 ans on a peur de rien, on n'a pas conscience de qui on est ou de ce qu'on a vécu, de l'impact des choses que l'on fait. Quand on est un enfant, les gens vous voient différemment.

Je me dis que cette insouciance, cette confiance que j'ai perdues, si elles sont quelque part, elles sont là-bas, en Angleterre, ou quelque part au milieu de la Manche, là où je les ai perdues. Parce que le reste du séjour s'est passé comme le reste de ma vie depuis, j'ai attendu que ça soit fini. Je lisais un gros livre, toujours, en marchant surtout, ce qui amusait beaucoup les adultes, à l'époque je lisais toujours en marchant, j'étais douée pour ça, j'ai remarqué l'autre jour que je l'étais encore.

Ce n'est plus la même chose que je lis, et je ne marche plus dans la même direction.

C'est banal, c'est revu, mais j'aimerais être un enfant encore, pas pour voir mes parents ensemble, pas pour faire les choses autrement, je n'ai pas la prétention de dire que j'ai des regrets, mais pour m'accrocher un peu plus à cette innocence qui fait des gens biens. Qui leur permet de regarder autour d'eux sans avoir peur, d'avancer un tout petit peu, par des petites choses.

C'est ça le problème avec les séries, dans ces situations il y a de la musique, une caméra, des plans qui rendent la scène vraie, qui font comprendre vraiment ce qui doit être compris.